Cinq millions de voitures produites et 600 embauches permanentes supplémentaires, l’usine Toyota de Valenciennes, dans le Nord, continue de défier l’industrie automobile française. Un succès qui met en avant la recette japonaise de productivité et de « lean Manufacturing ».
À Onnaing, Toyota a fêté le 26 novembre 2024 la production de sa cinq millionième voiture. ©Le Journal de l’Automobile
A Onnaing, près de Valenciennes, Toyota fête la production de sa cinq millionième voiture. Le petit SUV Yaris Cross habillé pour l’occasion d’une robe bleu-blanc-rouge a été spécialement peaufiné par les équipes du conception du fabricant japonais de Sophia-Antipolis (06) et peint par l’équipe de l’usine de production.
Pour cette occasion, Marc FerracciLe Ministre de l’Industrie, a fait le déplacement, tout comme le premier président de Toyota Motor Manufacturing France (TMMF), Hiroaki WatanabéPrésident du conseil d’administration de Toyota Motor Europe, Didier Leroyet bien sûr les équipes locales rassemblées autour Rodolphe Delaunayl’actuel président de TMMF.
Il est vrai qu’il n’y a pas beaucoup de bonnes nouvelles dans l’industrie automobile en ce moment. Célébrer l’augmentation de la production, ainsi que l’embauche permanente de 600 salariés qui, jusqu’à présent, travaillaient en CDD ou comme intérimaires, permet de changer du climat morose actuel. A quelques kilomètres d’Onnaing, Arcelor Mittal, fournisseur de Toyota, a annoncé la fermeture de son site de Denain (59).
Mais implanté depuis 2001 dans les Hauts-de-France, Toyota n’écoute pas la même musique. Cette année, les infrastructures nordistes approcheront même leur production maximale avec 286 000 voitures sorties de chaîne de montage, pour une capacité de 300 000. Ce qui fait de cette usine le premier site de production automobile en France.
A Onnaing, ce sont 5 000 salariés (bientôt 4 400 en CDI) qui produisent chaque jour près de 1 230 véhicules, avec trois équipes. Toutes les 58 secondes, une Yaris sort de la chaîne de montage. Dans 75 % des cas, il s’agit d’une Yaris Cross. Et 85 % de la production est destinée au marché européen, hors de France.
Une production labellisée Origine France Garantie
Mais il est difficile de réduire l’usine à un site d’assemblage. Ici, nous recevons des bobines d’acier. Nous estampons, nous produisons des pièces en plastique, nous assemblons et nous peignons. Et quand Philippe Martinezancien secrétaire général de la CGT, veut réduire l’usine à un simple site d’assemblage, c’est toute la direction de Toyota qui répond.
Didier Leroy en premier. « Que ceux qui expliquent que nous n’assemblons nos voitures qu’en dernière étape viennent les voir sur place.», réfute fermement ce dernier. D’autant que la Yaris Cross a de nouveau obtenu le label Origine France Garantie, qui certifie que 55 % de la valeur ajoutée est produite localement.C’est même 85% des pièces, en valeur, qui sont fabriquées sur place« , précise Nicolas Casierresponsable de la direction opérationnelle du site.
Un modèle de compacité et de flexibilité
Le tout en étant compétitif et rentable. Car Toyota, le premier, croyait en la capacité industrielle de la région. L’usine sert même d’exemple à des constructeurs comme Renault qui, basé à quelques kilomètres de là, à Douai (59), a complètement repensé son process industriel. Le site Electricité reprend les mêmes codes d’installation, très compacts.
« Une usine ne participe qu’à une très petite part du coût de production d’une voiture. La compétitivité se retrouve dans un process totalement optimisé et un lissage permanent de la production« , ajoute Nicolas Casier. C’est vrai que Renault avait embauché Luciano Biondodirecteur de l’usine Toyota entre 2016 et 2020. Le reformatage de Douai ressemble étonnamment aux installations de Valenciennes. Ces derniers tentent également de mettre en œuvre un modèle social toujours cité en exemple, y compris par les autorités locales.
Enfin, les relations entre le constructeur japonais et ses fournisseurs servent aussi de modèles que Marc Ferracci souhaiterait déployer. « C’est un modèle relationnel assez unique en France. Toyota demande à ses fournisseurs comment concevoir ensemble des pièces ou des sous-ensembles pour un prix indicatif. Ailleurs, on est plutôt dans une relation où le constructeur impose une production à un prix donné. J’aimerais que l’ensemble de la filière s’inspire de cette méthode basée sur l’amélioration continue, mais aussi sur une grande prévisibilité des niveaux de commandes. J’aimerais un modèle plus respectueux basé sur la qualité de la relation« , a précisé le ministre de l’Industrie lors de sa visite.
Un pari hybride payant
Mais selon Didier Leroy, il n’y a pas de secret chez Toyota. « Il suffit de se remettre en question et de disposer de la bonne technologie au bon moment. Parce qu’on ne tombe pas dans la mode« , lance-t-il comme un défi à l’électrification du marché.
Alors que tous les constructeurs sont passés à l’électrique dès que possible, Toyota reste volontairement dans sa stratégie hybride. « Cela ne veut pas dire que nous n’y croyons pas, mais que nous préférons être là au bon moment.« , poursuit-il.
Et visiblement, ce moment n’est pas encore arrivé. Expliquant que les ressources actuelles en lithium ne permettent pas de réelles visions de production après 2030, ce dernier rappelle que la quantité de lithium pour produire la batterie d’un véhicule électrique permet de produire six modèles hybrides rechargeables et 90 versions hybrides. « Miser sur une seule technologie, ce qui n’est pas attendu par le consommateur, n’est pas la bonne solution. D’autant que les États européens ne sont pas au même rythme de développement des infrastructures. Il serait plus réaliste de décarboner le parc de 285 millions de voitures en Europe que d’interdire le thermique !« , reste convaincu Didier Leroy.
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